mercredi 5 février 2014

Auto-entrepreneur: pourquoi les Poussins ne peuvent encore crier victoire

Auto-entrepreneur: pourquoi les Poussins ne peuvent encore crier victoire

Les défenseurs du régime de l'auto-entrepreneur peuvent souffler, mais sans baisser la garde. La commission des affaires économiques a retoqué l'abaissement des seuils prôné par Sylvia Pinel. Mais le parcours législatif peut encore être semé d'embuches.

Par Ludwig Gallet pour LEntreprise.com, publié le 
Auto-entrepreneur: pourquoi les Poussins ne peuvent encore crier victoire
La Commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale s'est largement inspirée des conclusions du rapport Grandguillaume pour amender la réforme du statut des auto-entrepreneurs.
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Voilà des mois que le mouvement des Poussins se mobilise contre le projet de loi relatif à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, présenté le 21 août 2013 par la ministre en charge du dossier, Sylvia Pinel. Des mois de contestation active sur la toile, qui ont, à première vue, fini par porter leurs fruits. Car mercredi 29 janvier 2014, la commission des affaires économiques a écarté l'ensemble des mesures qui suscitaient leur colère.
Un amendement adopté en commission prévoit désormais de créer "un comité de configuration en vue de parvenir à des propositions claires et complètes permettant d'instaurer un statut unique de l'entreprise individuelle". Les défenseurs du régime peuvent-ils déjà crier victoire ? Pas si sûr. Le texte ajoute que les conclusions de ce travail devront être rendues publiques dans les six mois de la promulgation de la loi. Le projet de loi sera quant à lui examiné à l'Assemblée nationale à compter du 12 février prochain.

La guerre des seuils

A l'origine du mécontentement, la volonté de la ministre de raboter substantiellement les seuils de chiffre d'affaires au-delà desquels un auto-entrepreneur devait basculer dans un régime dit classique, si le dépassement était avéré pendant deux années consécutives. De 81 500 euros pour les commerçants et 32 600 euros pour les activités de services [en 2013], il s'agissait d'abaisser ces seuils respectifs à 47 500 et 19 000 euros. Suffisant pour faire sortir de leur nid des Poussins particulièrement actifs, dignes successeurs des Pigeons, qui avaient parfaitement compris comment faire reculer le gouvernement en un rien de temps. Pour les défenseurs de l'auto-entrepreneur, cette réforme signifiait purement et simplement la mort du régime, créé en 2009. Autre griefs avancés : les coûts impliqués par le passage éventuel à un régime classique, de même que le temps accordé pour réussir sa transition jugé bien trop réduit.
Pour Sylvia Pinel, le dépassement d'un certain seuil au-delà duquel il ne serait plus possible de parler d'activité d'appoint justifie le passage à un régime classique. Une façon de répondre en partie à la colère des artisans, qui dénoncent une certaine concurrence déloyale. Mais pas seulement, puisque la ministre pointe aussi du doigt les dérives potentielles liées au régime des auto-entrepreneurs. Elle cite notamment le cas du salariat déguisé, qui en outre prive les auto-entrepreneurs de l'assurance chômage et de "certains droits comme les congés payés", expliquait la ministre en juin 2013.

Le député Grandguillaume à la rescousse

Au mois d'août, première victoire pour les Poussins. Car la version du texte telle que présentée par Sylvia Pinel dans son projet de loi a changé. Il ne fait plus mention explicite des seuils évoqués deux mois plus tôt. Pas question pour les Poussins de mettre un terme à la bataille puisqu'il était encore expliqué que les seuils pourraient être définis par voie de décret.
Ils attendent alors les conclusions du rapport du député Grandguillaume missionné par le gouvernement, en espérant que celui-ci se montre plus conciliant. Une stratégie qui s'est avérée payante, puisque le député propose dans son rapport de créer un statut unique de l'entreprise individuelle et de ne pas toucher aux seuils en vigueur. Soit exactement ce qui vient d'être adopté en commission des affaires économiques.
Reste à savoir si l'exécutif l'entendra de cette oreille. Au risque sinon d'y laisser quelques plumes.

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