jeudi 6 décembre 2012

Société unipersonnelle

Quel statut de société unipersonnelle choisir ?

EIRL, EURL ou SASU, presque toutes les sociétés commerciales peuvent être adaptées pour fonctionner avec un seul associé, qui est en même temps le dirigeant. Voici les critères à prendre en compte et les principales structures juridiques envisageables.

Par François Sabarly pour LEntreprise.com, publié le 

 

Les critères pour choisir une société
Le statut juridique de l'entreprise influence non seulement la capacité de l'exploitation à se développer et à s'adapter au marché, mais aussi la fiscalité personnelle du dirigeant, sa couverture sociale, les rapports des associés entre eux, la faculté ou non d'attirer des capitaux extérieurs.Dans tous les cas, le statut choisi doit permettre de développer l'entreprise et d'avoir les moyens de ce développement, mais aussi de limiter les risques financiers liés à l'exploitation ou de préserver le patrimoine personnel du dirigeant. Optimiser la fiscalité sur les bénéfices et rechercher la meilleure protection sociale sont également des critères importants.Souvent, l'exercice en société répond aussi à des objectifs précis : le fondateur recherche un cadre avantageux pour transmettre son entreprise à ses enfants, une structure qui lui permette de s'associer facilement avec d'autres professionnels ou au contraire de céder aisément les parts de la société.En fait, le choix d'un type de société dépend non seulement de la nature de l'exploitation, mais aussi des caractéristiques et de la fiscalité du statut envisagé et des objectifs personnels du dirigeant. Autant d'éléments qu'il faut arriver à combiner entre eux.

Bon à savoir : exercer en société unipersonnelle permet d'accueillir, ultérieurement, de nouveaux associés, ce qui ne peut pas être fait en entreprise individuelle.

 
L'EIRL : pour préserver votre patrimoine privé
L'entreprise individuelle à responsabilité limitée (EIRL) n'est pas une société en tant que telle. Il n'y a donc pas de capital social, et la notion d'associé n'existe pas. En pratique, la direction de l'entreprise est assurée par l'entrepreneur individuel.Toutefois, l'EIRL présente une particularité qui la rapproche, sur le plan fiscal, des structures sociétales. En effet, l'entrepreneur individuel est normalement soumis à l'impôt sur le revenu, mais il peut opter pour l'impôt sur les sociétés. Dans ce cas, ses cotisations sociales sont calculées sur sa rémunération et sur les bénéfices qu'il s'est distribués pour la part qui dépasse 10 % de la valeur du patrimoine professionnel affecté ou 10 % du bénéfice si ce dernier montant est supérieur. Lorsqu'il est soumis à l'impôt sur le revenu, ses cotisations sociales sont bien entendu calculées sur l'ensemble du bénéfice.La principale caractéristique de l'EIRL est d'isoler le patrimoine personnel du chef d'entreprise des risques liés à l'exploitation commerciale, puisque seul le patrimoine affecté à l'exploitation (le local commercial, l'outillage, les matériels...) sert de garantie aux créanciers professionnels. Attention néanmoins car la déclaration d'affectation des biens professionnels peut engager la responsabilité de l'entrepreneur si les valeurs déclarées pour ces biens ne sont pas exactes.A noter également que la création d'une EIRL ou la transformation d'une entreprise individuelle en EIRL n'entraînent pas nécessairement une taxation des plus-values, l'EIRL n'étant pas assimilée automatiquement, sauf sur option, à une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL). Seules les EIRL soumises à l'IS sont en effet assimilées à des EURL. Les EIRL relevant de l'IR échappent, en revanche, à cette assimilation. Ainsi, les plus-values constatées sur les biens provenant du patrimoine privé de l'entrepreneur individuel lors de leur affectation au patrimoine de l'EIRL ne sont pas taxées immédiatement, mais uniquement lors de la cession de ces biens par l'EIRL.

Bon à savoir : l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée relève dans tous les cas des régimes sociaux des non-salariés, quel que soit le régime fiscal de l'EIRL.
L'EURL : une SARL avec un seul associé

Une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) est une forme de SARL, mais avec un seul associé qui est le plus souvent le gérant. Elle permet à son dirigeant de bénéficier, en principe, de la limitation de sa responsabilité commerciale tout en conservant la maîtrise de l'exploitation.La création d'une EURL nécessite la constitution d'un capital social dont le montant est librement déterminé par l'associé unique dans les statuts. Ce capital doit être intégralement souscrit dès la création, mais peut être libéré dans les mêmes conditions que celui d'une SARL.Sur le plan fiscal, les bénéfices de l'EURL sont en principe soumis à l'impôt sur le revenu, mais il est possible d'opter pour l'impôt sur les sociétés dès la création de la société ou ultérieurement. Comme dans toute société soumise à l'IS, l'imposition des revenus du dirigeant est alors dissociée de celle des bénéfices de la société et le dirigeant peut percevoir des dividendes, en plus de sa rémunération. Attention : l'option pour l'IS est irrévocable. Par ailleurs, l'EURL relève obligatoirement de l'IS si l'associé unique est lui-même une société.A noter aussi qu'une EURL imposée à l'impôt sur le revenu a la possibilité d'adhérer à un centre de gestion agréé afin de dispenser l'associé unique de la majoration de 25 % appliquée sur les bénéfices déclarés.

Bon à savoir : la loi ne fixe pas de capital minimum pour les EURL. Ce capital peut être composé d'apports en numéraire, en nature ou en industrie (compétences techniques). En contrepartie de son apport, l'associé unique reçoit l'ensemble des parts sociales.
Les avantages et les limites de l'EURL

L'EURL présente un certain nombre d'avantages :- elle permet à un chef d'entreprise de créer, seul, une société sans avoir à s'associer à des partenaires ;- elle limite la responsabilité commerciale du fondateur au montant des apports faits à la société ;- elle peut être créée avec peu de capitaux ;- elle offre le choix entre imposition sur le revenu et imposition sur les sociétés ;- enfin, elle se transforme facilement en SARL.Pourtant, ce type de société n'a connu jusqu'à présent qu'un succès limité car l'EURL présente aussi des inconvénients :- son dirigeant ne peut en aucun cas avoir le statut de salarié ;- elle ne bénéficie d'aucun avantage fiscal supplémentaire par rapport à l'entreprise individuelle lorsqu'elle est soumise à l'impôt sur le revenu ;- son fonctionnement (comptabilité, droit des sociétés) est beaucoup plus contraignant que celui d'une entreprise individuelle et presque autant que celui d'une SARL.Par conséquent, si l'objectif du chef d'entreprise est de bénéficier d'une meilleure couverture sociale avec le régime général des salariés ou de payer moins d'impôt, il est inutile qu'il constitue une EURL. Lorsque, en revanche, le chef d'entreprise souhaite simplement réduire les risques commerciaux et financiers liés à l'exploitation, l'EURL est une solution envisageable. Mais il lui faut alors rester prudent pour éviter toute confusion entre les biens de l'entreprise et son patrimoine personnel. Bien entendu, il faut également éviter de se porter caution personnelle pour un emprunt souscrit dans le cadre de l'activité.

Bon à savoir : il est interdit au gérant ou à l'associé unique d'une EURL de contracter un emprunt auprès de la société, de se faire consentir par elle un découvert en compte courant ou de se faire cautionner par elle.

La SASU : une société anonyme avec un seul actionnaire
Surtout utilisée, lors de sa création, par les "grosses" PME ou les entreprises technologiques demandant de lourds investissements, la SASU connaît depuis plusieurs années un succès grandissant.Il s'agit d'une société anonyme simplifiée (SAS) avec un actionnaire unique, qui est généralement le président de la société. Comme la SAS, la SASU a pour originalité de laisser à l'associé une grande liberté pour rédiger les statuts et donc de prévoir le fonctionnement et même la direction de la société.Les dirigeants de la SAS et celui de la SASU peuvent toujours être salariés et donc bénéficier de la protection sociale du régime général (sauf l'assurance-chômage), alors même qu'ils sont majoritaires dans le capital. En EURL, au contraire, le gérant unique reste un non-salarié, même si la société a opté pour l'IS.Une SASU peut être créée sans capital minimum, ce capital étant fixé par les statuts. Elle peut profiter des avantages du régime fiscal de l'impôt sur les sociétés, qui sont d'autant plus sensibles que les investissements sont importants (voir ci-dessus à propos de l'EURL).

Des allégements pour les dirigeants de SASU
L'associé unique d'une SASU qui en assure également la présidence est dispensé :

- d'établir un rapport de gestion chaque année lorsque l'activité ne dépasse pas à la clôture d'un exercice social deux des trois seuils suivants : 1 million d'euros pour le total du bilan, 2 millions d'euros pour le chiffre d'affaires hors taxes, 20 personnes pour le nombre moyen de salariés permanents employés au cours de l'exercice ;
- de déposer au greffe du tribunal de commerce le rapport de gestion dans le cas où il serait tenu de l'établir.Rappelons qu'il est également dispensé d'approuver les comptes sociaux, cette formalité étant accomplie par le dépôt des comptes annuels et de l'inventaire au greffe du tribunal de commerce.

Bon à savoir : comme celles des EURL, les règles de constitution et de fonctionnement des SASU ont été simplifiées depuis trois ans. Notamment, le capital social peut être constitué avec des apports en industrie (c'est-à-dire des compétences techniques ou autres), et le dépôt au tribunal de commerce de l'inventaire et des comptes annuels vaut approbation de ces comptes.
Les avantages et les contraintes de la SASU

Comme la SAS, la SASU est une structure juridique à la carte qui offre une grande liberté d'organisation de la société. Cependant, elle contraint l'actionnaire unique à rédiger très soigneusement les statuts pour prévoir cette organisation et, en cas de transformation ultérieure en SAS ou même en société anonyme (SA), pour anticiper les conditions d'entrée et de sortie de nouveaux actionnaires.Pour un entrepreneur individuel, la SASU peut permettre de répondre à plusieurs objectifs :- la possibilité d'effectuer des apports en industrie permettant de valoriser un savoir-faire, sans recours à un contrat de travail ;- la possibilité d'obtenir des financements extérieurs par voie d'augmentation de capital et d'émission d'actions ;- la faculté de transformer la société en SAS avec plusieurs associés sans formalité particulière autre que celles qui sont liées à la cession des actions ;- une meilleure transmission de l'entreprise avec notamment la possibilité d'échelonner dans le temps l'attribution d'actions aux héritiers ou de céder les actions à un coût fiscal moindre que pour la vente d'un fonds de commerce.La SASU permet également au président et à son conjoint de profiter du régime fiscal des salariés et donc de déduire leur rémunération du résultat social, d'ouvrir droit pour le dirigeant au régime social des salariés, et, globalement, grâce à l'IS, de profiter d'un régime fiscal plus favorable lorsque l'activité nécessite de lourds investissements.Mais la SASU a également ses contraintes. Par exemple, la responsabilité limitée est souvent illusoire dans la mesure où les créanciers demandent presque toujours une caution solidaire du président. Bien sûr, comme dans toute société soumise à l'IS et surtout à forme anonyme, le formalisme administratif et comptable est assez coûteux, surtout au démarrage de l'activité.

Bon à savoir : l'impossibilité d'opter définitivement pour le régime des sociétés de personnes lorsque ce régime d'imposition est plus favorable peut aussi constituer un inconvénient de la SASU.


Se développer en créant une SARL
Passer de l'entreprise individuelle ou de l'EURL à la SARL est fréquent, dans la mesure où la SARL est la forme de société la plus utilisée en France. Les raisons de ce succès sont un fonctionnement pas trop compliqué, une absence de capital minimum et un nombre d'associés qui peut être limité à deux.Comme pour l'EURL, la responsabilité d'associé dans une SARL est théoriquement limitée au montant des apports faits à la société. Par ailleurs, le gérant minoritaire d'une SARL non soumise à l'impôt sur le revenu peut avoir le statut de salarié et être affilié au régime général de la Sécurité sociale. Le gérant majoritaire, en revanche, est rattaché au régime des travailleurs non salariés, comme un exploitant individuel.
D'autre part, les SARL de famille peuvent choisir leur régime fiscal, impôt sur les sociétés ou impôt sur le revenu, et les petites SARL non familiales peuvent opter temporairement pour l'impôt sur le revenu. Le régime de l'impôt sur le revenu est plus simple, mais le régime de l'IS permet de réinvestir les bénéfices hors impôt, ce qui constitue un avantage appréciable.Néanmoins, la SARL n'est pas sans défauts. Le premier est un formalisme administratif et comptable plus contraignant que celui exigé dans une entreprise individuelle, entraînant des frais nettement plus élevés. Ensuite, pour avoir le statut de salarié, il ne faut pas être gérant majoritaire et accepter, par conséquent, de ne pas avoir le contrôle total de la société.

Bon à savoir : dans les SARL, les décisions sont prises au moins à la moitié des voix plus une. Mieux vaut donc ne pas être associé à égalité avec une autre personne car, en cas de désaccord, la société risque d'être paralysée.