mercredi 6 avril 2016

Quel statut juridique pour mon entreprise aux Etats-Unis ?

Quel statut juridique pour mon entreprise aux Etats-Unis?

 Patricia Carreras, publié le 
Le statut de "sole proprietorship" est celui qui est privilégié par les entrepreneurs aux Etats-Unis, bien qu'il ne soit pas très protecteur.
Le statut de "sole proprietorship" est celui qui est privilégié par les entrepreneurs aux Etats-Unis, bien qu'il ne soit pas très protecteur.
Istock/michaelquirk

Existe-t-il autant de statuts juridiques aux USA qu'en France? Faut-il se payer les conseils d'un avocat pour créer sa structure ? Extrait de "Lancer sa start-up aux Etats-Unis", de Patricia Carreras, aux éditions Eyrolles.

Tu as décidé de monter une société aux États-Unis ? Dès lors, il faut choisir entre les différents statuts juridiques existant dans le droit américain. (...)  
Aux États-Unis, une entité est généralement régie par le droit de l'État où elle est constituée. Cela s'applique à de nombreux aspects de l'activité. Au niveau fiscal, si le Code fédéral des impôts est applicable à tous les états, chaque État et parfois même certaines villes ont leur fiscalité propre. De nombreux États comme la Floride, le Nevada ou le Texas ne prélèvent pas d'impôt sur les revenus individuels, alors que d'autres, comme celui de New York, pratiquent une fiscalité élevée. 
Se faire assister par un avocat s'avère donc indispensable. Les professionnels spécialisés ne manquent pas. Mieux vaut choisir un avocat exerçant de préférence dans l'État où l'on souhaite s'installer. Les conseils d'un comptable ou d'un fiscaliste peuvent également s'avérer précieux. Essaye de te renseigner auprès d'amis ou de start-up locales ayant déjà résolu ce type de question.  
Tu peux monter une société sans avoir de visa, car la création d'une entreprise relève du droit applicable dans chaque État, tandis que les questions relatives à l'immigration sont gérées par la réglementation fédérale. Cependant, sans visa, tu ne pourras ni embaucher de salarié ni toucher de l'argent
La constitution d'une société aux États-Unis est peu coûteuse et peut se faire rapidement. La simple incorporation ne devrait pas coûter plus de 1 500 dollars et est réalisée en moins d'une heure en ligne. 
Tu as le choix entre plusieurs types de structures juridiques.Nous nous concentrerons sur trois options, considérées comme les plus classiques : 
  1. Sole proprietorship ;
  2. Limited Liability Company (LLC) ;
  3. C Corporation.
La première n'entraîne pas la création d'une personne morale, contrairement aux deux autres.  

1. Sole proprietorship

Le sole proprietorship désigne l'exercice d'une activité individuellesans création de personne morale américaine. C'est la forme juridique la plus répandue aux États-Unis, même si ce choix peut sembler illogique au regard des risques encourus par l'entrepreneur. En effet, ce dernier devient responsable à titre personnel des obligations de l'entreprise. 
Sa responsabilité est illimitée et il s'engage sur ses biens propres. 
Par ailleurs, le danger en termes de litige est non négligeable. Aux États-Unis, pays très procédurier, les clients, les assurances, les fournisseurs, etc., n'hésitent pas à recourir aux tribunaux pour régler les différends. C'est donc un risque important, particulièrement au vu des frais engendrés et de la capacité des parties à obtenir des informations détaillées sur l'adversaire par le biais des procédures d'instruction. 
Les avantages. Néanmoins, assurances et prudence aidant, ce risque peut être acceptable, surtout si l'on considère les avantages présentés par cette structure. Les attraits du sole proprietorship, entendu comme la conduite d'une activité commerciale par l'entrepreneur - qui peut être une personne physique ou morale étrangère - tiennent à sa simplicité ainsi qu'à l'avantage fiscal qui découle éventuellement de l'absence de personnalité morale américaine. 
• Simplicité, car le sole proprietorship se distingue par le peu de formalisme nécessaire à sa constitution. Il suffit d'inscrire un nom ("assumed name certificate", appelé parfois "d.b.a" pour "doing business as"). En outre, la comptabilité se limite à un relevé des dépenses et des recettes essentiellement destiné au calcul du bénéfice imposable. Enfin, si l'entrepreneur ne peut être salarié de son entreprise, il peut mettre en place une couverture sociale pour lui-même et son personnel. 
Cette structure est particulièrement adaptée lorsque l'activité projetée est par essence individuelle. En effet, si le projet échoue, les problèmes administratifs liés à la cessation d'activité sont fortement réduits. 
• Un avantage fiscal, car l'absence de personnalité morale entraîne l'imposition des bénéfices au seul niveau de l'entrepreneur ; de plus, les pertes inhérentes à toute première phase d'activité étant par nature intégrées dans les résultats de l'entrepreneur à l'étranger, elles sont déduites de son revenu imposable.  
• Au niveau local, les procédures obligatoires concernent essentiellement les licences d'occupation (bâtiments, zones d'activité, etc.) et l'obtention de certaines autorisations pour les professions réglementées. Si l'enregistrement de l'entreprise n'est pas nécessaire, certaines formalités de démarrage le sont. Si l'entreprise ne porte pas le nom du dirigeant, le formulaire d.b.a doit être complété. Ce document est obligatoire pour ouvrir un compte bancaire. De plus, le sole proprietorship doit collecter le cas échéant sur les ventes de certains produits et services la taxe sur les ventes (sales tax) dans l'État où il se situe et dans ceux où il est amené à exercer. L'entrepreneur doit se procurer un numéro d'enregistrement auprès de l'administration compétente.  

Limited Liability Company et C Corporation

Les deux autres statuts juridiques prioritairement conseillés aux États-Unis, la Limited Liability Company (LLC) et la C Corporation (C Corp), entraînent la création d'une personnalité morale. Le choix entre les deux s'opère en fonction de critères définis par l'entrepreneur. 
La LLC et la C Corp présentent toutes deux l'avantage de limiter la responsabilité des propriétaires à leurs apports en capital. La différence essentielle entre les deux types de structures est que la LLC, contrairement à la C Corp, peut être fiscalement transparente. La structure ne paie alors pas d'impôts sur ses bénéfices sur lesquels sont directement imposés les membres de la LLC, selon un pourcentage prédéterminé entre eux. Ce mécanisme élimine la double imposition que supporte le propriétaire d'une C Corp. Les bénéfices de cette dernière sont en effet imposés une première fois au sein de la société. Les actionnaires sont ensuite imposés sur les dividendes perçus, à l'image de ce qui existe en France dans les sociétés anonymes.  

2. Limited Liability Company (LL C)

Caractéristiques. La LLC est une forme juridique relativement nouvelle qui conjugue les avantages des partnerships et ceux des corporations. À l'image des corporations, la LLC permet de limiter la responsabilité des associés à la responsabilité de ses associés, aussi appelés "members", dont le nombre n'est pas limité aux apports de ces derniers. Les "members" ne sont pas personnellement tenus responsables des dettes et des obligations de la société. 
Les règles encadrant le fonctionnement et la constitution des LLC sont essentiellement fixées au niveau de l'État. Elles donnent aux "members" des LLC une grande amplitude d'action. La LLC est soumise à des obligations comptables importantes, mais n'est pas redevable de l'impôt sur les sociétés ; seuls les "members" sont taxés, évitant ainsi la double imposition.  
Modalités de constitution. Pour former une LLC, il faut s'inscrire auprès de l'État choisi, puis remplir un document constitutif qui peut porter différents noms selon l'État. On parle ainsi d'"articles of organization". La gouvernance ainsi que les relations entre actionnaires sont définies par un operating agreement qui peut être un document complexe étant donné les subtilités fiscales et la grande liberté contractuelle accordée aux "members". 
La différence la plus marquante entre les règles américaines et françaises est l'existence d'un capital minimum dans les entreprises françaises, alors que les sociétés américaines échappent à cette obligation. La création d'une société ne nécessite par ailleurs pas la désignation d'un commissaire aux apports.  
Toutefois, des deux côtes de l'Atlantique, le recours à un cabinet d'avocats est indispensable, notamment pour rédiger les statuts. "Mieux vaut prévenir que guérir !, répète F. Chateau, partenaire dans le grand cabinet juridique Denton.  

3. C Corporation (C Corp)

Caractéristiques 
Le recours à ce type de structure se fait plus rare depuis la création des LLC. 
La création d'une C Corp est soumise à un formalisme important et le recours à un conseiller juridique est là aussi indispensable. Ainsi, la tenue d'une comptabilité complète est obligatoire et des assemblées générales doivent être réunies périodiquement.Les bénéfices après impôts peuvent être utilisés pour le financement de l'entreprise ou être distribués sous forme de dividendes. En l'absence de distribution, les bénéfices sont taxés en tant que gain en capital.  
En cas d'accumulation "excessive" des bénéfices, une taxe de 28%est appliquée. Une C Corp peut échapper à cet impôt si elle prouve que les sommes mises en réserve sont nécessaires pour faire face à un endettement ou à un investissement important.Les dividendessont pour leur part considérés comme des revenus et imposés en tant que tels. Quant aux actions qui composent le capital, elles sont généralement librement négociables, à moins d'être restreintes par un pacte d'actionnaires.La responsabilité des associés est limitée à leurs apports respectifs.  
Le comité de direction détermine les grandes orientations de l'organisation et recrute les officers, qui assurent la gestion quotidienne de l'entreprise.Le nombre d'actionnaires est limité à soixante-quinze, qui doivent tous être résidents fiscaux américains. Ils peuvent bénéficier des plans de retraite mis en place par l'entreprise.  
Une corporation peut adopter le statut de small corporation (S Corp)pour devenir transparente fiscalement. Sa constitution est similaire à celles d'une C Corp (formulaires, franchises, etc.). Pour opter pour ce régime spécial, le board (conseil d'administration) doit toutefois remplir un formulaire supplémentaire à destination de l'IRS (Internal Revenue Service), l'agence du gouvernement fédéral qui collecte les impôts.  
Modalités de constitution 
La constitution de la C Corp requiert en premier lieu l'enregistrement d'un certificat d'incorporation, comprenant les caractéristiques de base de l'entité : le nom et l'adresse de la société, les caractéristiques des titres de la société, les coordonnées de la personne devant recevoir le courrier officiel, les objectifs et la durée de vie de l'entreprise, les règles encadrant les relations de celle-ci avec ses actionnaires, enfin le nom de l'incorporator. 
L'incoporator désigne la personne chargée de la création de l'entreprise, sans en être nécessairement actionnaire (avocat, conseiller, etc.). Il quitte l'entité une fois qu'il a nommé le comité de direction (board). 
Le certificat d'incorporation est enregistré auprès du Secretary of State de l'État choisi, un service qui ne propose aucun conseil et ne tranche aucun différend. Ce document définit les caractéristiques des titres de la société. Il peut s'agir d'actions avec ou sans droit de vote, préférentielles, etc. Leur nombre et leur prix doivent être définis. Un certain nombre d'actions peut être mis en réserve et vendu lorsqu'un nouvel associé rejoint la société. Aucun capital minimum n'est imposé, mais le Code fiscal (niveau fédéral) limite le ratio de prêt d'actionnaires.  
S'agissant du choix du nom de la société, l'entrepreneur peut choisir n'importe quelle dénomination dès lors qu'elle n'est pas déjà utilisée dans l'État où il désire opérer. Si l'activité de la nouvelle entreprise dépasse les frontières de l'État, le créateur doit s'assurer que le nom n'est pas employé par d'autres sociétés au plan national, soit cinquante États ! La vérification peut se faire dans les Pages Jaunes (Yellow Pages), auprès des trademarks offices, équivalent de l'INPI (Institut National de la Propriété Industrielle), etc. En cas de querelle sur une dénomination, le recours aux tribunaux est la seule solution. Enfin, la dénomination sociale peut différer du nom de la marque.  
Le certificat d'incorporation doit spécifier le nom d'un registered agent, c'est-à-dire la personne que l'État contacte pour toutes les formalités administratives. Cet agent peut être l'avocat qui s'est chargé de la création administrative de l'entreprise ou une société de services. 
La corporation n'a pas de durée de vie maximale. L'incorporator peut choisir celle qu'il souhaite. Quand la durée d'activité est inconnue, la mention "perpetual existence" doit être ajoutée dans le document d'incorporation. Le Code des sociétés de l'État permet d'inclure des "special provisions" dans le certificat d'incorporation prévoyant par exemple des règles de vote spéciales, spécifiant les dates des assemblées générales, etc. Ces special provisions peuvent également être incluses dans les statuts. 
L'incorporator nomme alors un board, qui nomme à son tour les officers et reçoit les apports en capital. Le board prendra ensuite un certain nombre de décisions initiales. Le board ou l'incorporator approuve les "by-laws", c'est-à-dire le règlement interne. 
S'il y a plusieurs actionnaires, il faut mettre en place un pacte d'actionnaires. À titre de comparaison, dans une LLC, l'operating agreement ou l'accord d'exploitation remplit la double fonction de définir les principes de gouvernance (by-laws d'une C Corp) et les relations entre propriétaires (shareholders'agreement pour une C Corp). 

4. La S Corp

Pour pouvoir la créer, il faut d'abord être résident fiscal aux États-Unis. Les associés ne pouvant être que des personnes physiques, ce ne peut donc pas être une filiale d'une société française par exemple. De plus, le nombre d'associés est limité à cent, ce qui, en termes de développement, peut s'avérer limitant. 
Les avantages en termes de fiscalité vont plus loin que pour la LLC, car on peut économiser le montant des charges fiscales salariés et employeur, soit 15,3%, dont chaque indépendant ("self-employed") s'acquitte aux États-Unis et qu'un actionnaire de LLC doit verser. Le ou les actionnaires d'une S Corp vont économiser ces taxes. 
Néanmoins, je ne conseille pas de choisir la S Corp, mais plutôt la LLC ou la C Corp, plus adaptées à une éventuelle entrée en Bourse. Une fois le statut juridique de votre entreprise choisi, il faut établir les modalités de constitution, les obligations fiscales et les contraintes sociales. 
Là encore, il est indispensable de solliciter l'aide d'un avocat. N'imaginez même pas créer votre entreprise en réglant les points juridiques vous-même. Dès le départ, l'appui d'un expert s'impose pour vous aider à choisir le meilleur statut juridique, tout en prenant en compte vos futures obligations fiscales. La structure juridique fonctionne ? Il ne reste plus qu'à embaucher.  




























































































































































































































































































































































source : http://lentreprise.lexpress.fr/creation-entreprise/statuts/les-statuts-juridiques-d-une-entreprise-aux-etats-unis_1778383.html