lundi 14 janvier 2019

Ils ont adoré/détesté le statut d’autoentrepreneur

Ils ont adoré/détesté le statut d’autoentrepreneur

Par Florent Vairet |  mis à jour le 10/01/2019
 
Sur 591.000 entreprises créées 2017 l\'Insee, 241.800 micro-entrepreneurs.
Sur les 591.000 entreprises créées en 2017 selon l'Insee, 241.800 étaient des micro-entrepreneurs. @Shutterstock

Le statut de micro-entrepreneur (nouveau nom pour auto-entrepreneur) fête cette année ses 10 ans. Aujourd’hui, ils sont 1,3 million à gérer leur petite entreprise, mais nombre d’entre eux dénoncent les travers d’un statut inadapté pour faire du business.

Créé en 2008, le régime français de travailleur indépendant a vu le jour dans le but de réconcilier les Français avec l’entrepreneuriat. Le mot d’ordre : flexibilité. Une décennie plus tard, le contrat semble être rempli avec 1,3 million de jeunes et moins jeunes désormais à la tête d’une petite entreprise.
Seulement, à regarder de plus près, le tableau est moins idyllique. Tous les micro-entrepreneurs sont loin d’avoir les moyens de se dégager un salaire. Pis, une partie ne réalise aucune vente. Selon une étude de 2015 réalisée par l’Insee, seuls 61% déclarent un chiffre d’affaires positif. Résultat : la durée de vie de ces micro-entreprises est souvent courte. Parmi celles créées en 2010, les trois-quarts avaient mis la clef sous la porte cinq ans plus tard.

Un RSI “trop pesant”

Arthur Tutin, 26 ans, est un entrepreneur dans l’âme. Depuis sa majorité, il enchaîne les projets (Regain Magazine, Bees of the world, TrocWine, le mouvement WineTech qui promeut les startups les plus ambitieuses dans le vin…). Il a également lancé Les Chapeaux d’Aliocha en 2013, cette fois sous le statut d’auto-entrepreneur. Mais il le promet : on ne l’y reprendra plus.
Selon lui, les cotisations du régime social des indépendants (RSI), nouvellement appelé Sécurité sociale des Indépendants, sont trop pesantes. “Les charges  impactaient fortement ma trésorerie, sans compter que ça ne permettait pas de me rémunérer suffisamment”, témoigne Arthur, qui a tenu deux ans sous ce régime. Selon la dernière étude Insee, les micro-entrepreneurs tiraient en moyenne 440 euros mensuels de leur activité en 2015. Un chiffre à relativiser car 3 micro-entrepreneurs sur 10 ont une activité salariée.
À LIRE AUSSI
  • ARTICLE
    Autoentrepreneurs : ce qui change en 2019
Depuis la réforme de 2018, le taux de cotisations a légèrement baissé passant de 24% à 22% pour les entreprises de prestations de services et de 14 à 12,8% pour celles qui font des ventes de marchandises. Des taux réduits ont également été mis en place pour les premières années de la création d’activité mais qui s’appliquent dès le premier euro de chiffre d’affaires.

L’impossibilité de lever des fonds sans exploser les plafonds

Le taux des cotisations n’est pas le seul grief porté par Arthur. Lors de son lancement, le plafond du chiffre d’affaires - au-dessus duquel le statut d’auto-entrepreneur n’était plus valide - était fixé à 82.000 euros. “Trop peu” selon lui. Le gouvernement d’Edouard Philippe semble avoir entendu ces plaintes régulières. En 2018, il les a doublés pour atteindre 170.000 euros pour les activités de commerce et de fourniture de logement et 70.000 euros pour les prestations de service et les professions libérales.
À LIRE AUSSI
  • ARTICLE
    Auto-entrepreneur : attention au salariat déguisé
Ces rehaussements des plafonds n’empêchent pas certains de s’arranger avec les chiffres. Pour les contourner, des micro-entrepreneurs se montrent tout aussi rusés/roublards que d’autres entrepreneurs. Il nous a été confié qu’il était une pratique commune de décaler des factures d’une année sur l’autre ou de recourir à l’argent noir pour diminuer leur chiffre d’affaires déclaré.
Pour Arthur, ces plafonds posent un autre problème. “Le statut de micro-entrepreneur ne rend pas possible la levée d’argent, même quelques dizaines de milliers d’euros. La moindre levée de fonds, y compris auprès de l’entourage familial, vient gonfler le chiffre d’affaires”, et fait exploser les plafonds.

Seul un compte bancaire particulier suffit

Ce serial-entrepreneur reconnaît que la formule a le mérite de la flexibilité et constitue un bon tremplin vers la création d’une - vraie - société. “Elle permet de mettre sur le marché facilement une solution et de la tester auprès des clients”.
À LIRE AUSSI
  • ARTICLE
    "Pourquoi j'ai créé ma première entreprise à 16 ans"
Chanthavy Tan, 27 ans, a géré une première boîte sous le statut de société par actions simplifiée (SAS) puis a choisi l’auto-entrepreneuriat. “En quelques jours, ma micro-entreprise était enregistrée et je pouvais utiliser ma plateforme de coaching”.
En plus des démarches simplifiées, l’administration n’oblige pas les auto-entrepreneurs à avoir un compte bancaire professionnel dédié, comme c’est le cas pour les autres sociétés. Elle exige néanmoins un compte personnel distinct de celui utilisé pour les finances personnelles. “Autant de frais économisés à un moment crucial de la vie de l’entreprise”, conclut Chanthavy Tan.
https://start.lesechos.fr/entreprendre/temoignages-entrepreneurs/ils-ont-adore-deteste-le-statut-d-autoentrepreneur-13858.php
PAR FLORENT VAIRET