vendredi 21 septembre 2018

Créer son entreprise : il n’y a pas d’âge pour commencer

Créer son entreprise : il n’y a pas d’âge pour commencer

>Économie>Entreprises et Start-up|Delphine Denuit et Cyril Peter|03 septembre 2018, 14h48|MAJ : 11 septembre 2018, 16h25|1
Guidés par une enseignante, des collégiens s’initient à la création d’entreprise dans le cadre d’un partenariat avec l’association Entreprendre pour apprendre. EPA

A l’heure où leurs camarades préparent leurs cartables, eux peaufinent leur business plan

«Avant, pour créer une entreprise, il fallait une usine, maintenant, un simple ordinateur suffit. » Et Dominique Restino, président du Mouvement pour les jeunes et les étudiants entrepreneurs (Moovjee) de citer son expérience lorsque mineur, il vendait les vieilles cravates de son père pour se faire un peu d’argent... Drone mesurant la pollution de l’air, robot escrimeur, site de vente en ligne de vêtements… Les projets des bébés entrepreneurs, pas encore majeurs, tournent aujourd’hui autour du numérique, de la mode ou encore de l’environnement.
Combien sont-ils ? Difficile, voire impossible de répondre. « Nous ne disposons d’aucune donnée précise concernant les moins de 18 ans, assure Sandrine Plana, responsable des études statistiques de l’Agence France Entrepreneur (AFE). On sait par contre qu’un quart des créateurs d’entreprise français sont âgés de moins de 30 ans, dont 8 % ont moins de 25 ans, ce qui représente près de 45 000 jeunes chaque année. »

Les « success stories » inspirent certains jeunes

Pour l’experte, on assiste même à « un boom de la création d’entreprise chez les jeunes ». Ce mouvement est particulièrement visible depuis les années 2000 et l’essor d’Internet. « Le nombre d’entreprises créées par des moins de 30 ans a été multiplié par trois en douze ans, jusqu’à atteindre 308 créations en 2014  pour 100 en 2002», souligne-t-elle. Un mouvement né avec la création des statuts de l’autoentrepreneur (2009), de l’étudiant entrepreneur (2014) et la possibilité pour les parents d’autoriser la création d’entreprise (2010).


La médiatisation de success stories pousse aussi certains jeunes à prendre leur destin en mains quand le chômage reste élevé. « Il existe un star system de l’entrepreneuriat », estime même Dominique Restino. Si les coques de smartphones et les porte-clés connectés ont remplacé les cravates, ces jeunes aventuriers à la forte personnalité font parfois encore face aux freins administratifs et aux préjugés de leurs aînés, banquiers, clients ou fournisseurs.
Les mentalités ont pourtant commencé à évoluer. La preuve : on apprend à créer et gérer sa boîte dès l’école. L’association Entreprendre pour apprendre accompagne chaque année 30 000 jeunes dans les collèges et lycées.


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Guidés par leurs professeurs, collégiens et lycéens s'initient à la création d'entreprise./EPA

ÇA S’APPREND DÈS L’ÉCOLE

Des pailles en maïs recyclables : c’est le produit conçu et fabriqué par les lauréats du championnat de France 2017-2018 organisé par Entreprendre pour apprendre (EPA). L’association s’invite depuis 1989 dans les collèges et lycées publics et privés. L’an passé, elle a accompagné 33 000 jeunes (87% de mineurs) à travers son programme Mini-entreprise.
Le principe ? Des groupes de 12 à 25 élèves sont guidés, à raison de deux heures par semaine, pendant une année scolaire, par un intervenant d’EPA, un professeur et un parrain, patron d’une PME locale ou salarié d’une multinationale.
La première étape est de trouver un projet. A l’issue, les ados passent des entretiens avec des recruteurs professionnels, partenaires de l’association, afin de déterminer le rôle de chacun pour sa réalisation : PDG, responsable administratif...

Un complément aux compétences académiques

Dans la foulée, l’équipe finalise l’étude de marché et collecte des fonds, souvent auprès des parents. Suivent, éventuellement, les phases de production puis de commercialisation. « C’est aux entrepreneurs de chercher les espaces de vente : dans l’établissement, sur les marchés, dans des galeries marchandes ou des entreprises partenaires », explique Adeline Mongrué, la directrice nationale d’EPA. Et si la mini-société génère des bénéfices ? « Ils reversent 20% à une association de leur choix, précise-t-elle. Le reste finance les sorties scolaires ou une activité ludique. »
Pour elle, cette expérience leur permet de « développer des atouts complémentaires aux compétences académiques, comme la prise de parole en public ». Utile pour convaincre le jury de son championnat régional, en vue de décrocher le titre national, connu à Lille (Nord), en juillet prochain.
C.P.

CE QU’UN MINEUR PEUT FAIRE... OU PAS

Fonder seul une entreprise
VRAI. Un mineur peut créer son entreprise s’il obtient du juge des tutelles son émancipation. Effectuée par son représentant légal (parents, tuteur…), cette procédure est souvent fastidieuse. Mais si elle aboutit, elle lui offre toute latitude pour créer une société, à l’exception d’une entreprise individuelle commerciale (sauf autorisation expresse du juge). « A défaut d’émancipation, le mineur pourra créer sa société selon trois statuts (EIRL, EURL ou SASU) s’il dispose d’une autorisation écrite de son représentant légal mentionnant les actes de gestion qu’il peut accomplir seul », précise Laurence Piganeau, directrice expertise et production à l’Agence France Entrepreneur.
Créer son entreprise sous le régime microentrepreneur.
VRAI. Mais à condition de respecter les règles mentionnées ci-dessus, car un microentrepreneur est avant tout un entrepreneur individuel. « Un mineur émancipé pourra donc exercer une activité libérale ou artisanale sous ce régime, souligne Laurence Piganeau. Il devra obtenir une autorisation du juge des tutelles ou du président du tribunal de grande instance selon les cas si son activité est commerciale. S’il n’est pas émancipé, il devra opter pour le régime de l’EIRL (Ndlr : Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée). C’est tout à fait possible dans le cas d’une microentreprise.
Demander à l’un de ses parents de lui servir de prête-nom.
VRAI. Il est fréquent que le mineur décide de créer une société en nommant un de ses parents à sa tête jusqu’à sa majorité. « Mais attention, le créateur et son parent doivent être conscients des risques encourus par ce dernier. En tant que dirigeant, il est civilement et pénalement responsable. Une telle situation ne peut s’envisager que s’il est prêt à s’impliquer réellement dans la gestion de l’entreprise », explique Laurence Piganeau.
Recruter ou contracter un crédit.
VRAI et FAUX. Un mineur émancipé est libre d’embaucher et de souscrire un emprunt. « S’il n’est pas émancipé, l’autorisation écrite de son représentant légal devra stipuler qu’il peut recruter et il devra faire intervenir son représentant légal pour une demande de crédit », précise la spécialiste. En pratique, il est rare qu’un mineur, quelle que soit sa situation juridique, obtienne un emprunt bancaire pour le financement de son entreprise sans la caution des parents.
D. D. et C. P.

source : http://www.leparisien.fr/economie/business/creer-son-entreprise-il-n-y-a-pas-d-age-pour-commencer-03-09-2018-7874727.php